Pour l’élevage des Gauloises en liberté le milieu de l’hiver est une période particulière. L’allongement des jours se perçoit à peine que les jeunes de l’année briguent la chefferie et se défient pour le contrôle du clan et du territoire. Message de leur nature : « Que le plus vigoureux gagne et assure la descendance de la famille au printemps approchant !«
La manifestation de cet ordre naturel touche beaucoup notre sensibilité mais en voyant la tribu dans son entier et non pas l’individu seulement, elle est plus facile à accepter.
Évidemment, nous veillons au mieux à la sécurité de nos sujets par une présence attentive permanente.
Encore une fois, les gaulois sont des coqs doux et gentils, ils ne sont absolument pas agressifs envers les personnes ni les enfants mais pour survivre, cette race compte sur l’établissement de l’ordre hiérarchique naturel et la transmission des meilleures qualités de survie.
La plupart des éleveurs ont vécu le sacrifice du coq chef qui attire à lui le renard pour que survivent ses poules. De même l’alerte du coq à la vue d’un « OVNI » (gros volatiles, rapaces, avion, etc).
Passionnés de la race gauloise et acteur engagés de son redéveloppement, nous honorons tous les aspects de cette nature gauloise.
Mais voilà, dans cette période particulière compliquée par des pluies drues incessantes, les élevages en liberté peuvent s’attendre à un bouleversement peut-être brutal de la hiérarchie. Redoublez d’attention !
Depuis 2 jours suite à une journée très pluvieuse la hiérarchie chez nous a été renversée. Le jeune chef putatif (chef de l’année présumé mais pas encore confirmé) a été évincé et malheureusement il a perdu un œil dans la joute. La bataille s’est déroulée loin de notre surveillance.
La situation est tendue depuis car tout nouveau chef de clan doit asseoir son pouvoir et répondre énergiquement aux provocations pendant une quinzaine de jours encore.
Dès reconnaissance du nouveau chef par tous, la tranquillité reviendra et devenu « reproducteur », il occupera à vie un statut social spécial à dépoussiérer régulèrement…
Un coq vivant un peu à l’écart avec ses poules est moins exposé à la rivalité. Toutefois des outsiders l’approchent parfois pour tenter de produire leur propre descendance. Il se défend âprement et y a d’ailleurs laissé l’apex (l’extrémité) d’un crétillon.
Le week-end dernier, un ami élevant aussi en liberté a vu son gaulois dominant tuer net un de ses fils de 7 mois.
C’est un cas extrême. Les conséquences des joutes sont le plus souvent des blessures aux barbillons, à la crête et aux oreillons. Elles cicatrisent seules facilement, un éborgnement sans complications également.
D’expérience, la surabondance de précipitations est un facteur de désordre à deux titres :
- la pluie intense et continue et l’inondation du milieu obligent les clans à se rapprocher les uns des autres dans les zones abritées.
Nous avons monté 4 préaux disséminés sur les territoires car selon nous la promiscuité forcée est un facteur favorisant des joutes.
- un coq au plumage détrempé perd de son charisme et paraît moins imposant. S’il est le chef, il devient aussitôt la cible de provocations répétées par des coqs au plumage sec et rutilant plus impressionnant.
PLUIES INTENSES et CONTINUES = HIÉRACHIE EN DANGER et risques d’incidents
L’aspect « roots » leur inspire davantage confiance…
Pour le coq éborgné, ce handicap n’est pas trop grave, c’était arrivé à notre ancien reproducteur Valérian aujourd’hui dans le Var où il continue sa vie de champion reproducteur dans un élevage familial.
En observant de près les outsiders,
on sent physiquement une pression incroyable venant du plus profond d’eux les poussant à défier le chef au mépris du danger et jusqu’à épuisement.
Dans cette période vitale, cet élan vital donne tout son sens à leur existence de jeune coq. C’est un peu difficile à accepter mais ces joutes doivent se dérouler pour servir la race gauloise et il n’est pas question que nous les privions de cette expérience de vie essentielle.
Les joutes et provocations se déroulent toute la journée et nous faisons en sorte qu’elle ne tournent pas au drame ou au carnage.
Elles ont été pour nous l’occasion d’une autre observation très intéressante…
Face-à-face tendu à l’extrême, les corps ramassés et les camails largement déployés comme des magnifiques parasols, les coqs se tiennent immobiles et totalement silencieux. D’un coup, c’est l’attaque foudroyante bec en avant qui vise la tête.
Dans l’éclair de l’attaque, ce sont les oreillons qui se détachent le mieux.
Voici notre observation,
Les challengers ne visent pas les yeux mais bien les oreillons qui deviennent les cibles (la tête) mais aussi des leurres pour limiter le risque d’éborgnement.
Les oreillons seraient-ils non pas des appâts sexuels à l’endroit des poules mais des défenses anti-éborgnement ?
Et alors, les oreillons blancs apporteraient-ils un avantage au coq gaulois dans une joute face à un autres dont les oreillons sont rouges ?
Nous sommes fin janvier, après une dizaine de jours le pouvoir s’est établi. Les assauts de challengers se font plus rares. Nous avons avons fait au mieux pour éviter les effusion de sang mais crêtes, barbillons et oreillons portent les stigmates des joutes. Les coqs les arborent avec fierté comme l’ancien combattant ses médailles.
Progressivement on assiste alors à une véritable collaboration des seconds parmi lesquels, en cas de disparition du chef, un successeur prendra en main la conduite et la survie de la tribu.
Le 12/01/2022